Ça y est ! IT-Trans 2024 s’est achevé après trois jours intenses à Karlsruhe. OpenIT était présent en force pour cette édition et vous propose aujourd’hui un compte-rendu sur les tendances actuelles de la digitalisation des transports publics.
De nombreux acteurs de la branche étaient présents et ont animé un peu plus d’une cinquantaine de conférences pour présenter leurs projets clés ainsi que les apprentissages réalisés. Voici les dernières tendances pour les entreprises de transports publics, avec un focus particulier sur l’innovation technologique.
Les technologies au centre de la digitalisation des transports publics
Deux domaines technologiques ont dominé les discussions lors de ces trois jours : la data/intelligence artificielle et la cybersécurité.
Intelligence Artificielle et Data
L’IA, accompagnée de sa « petite sœur » la data, a été omniprésente et citée dans la quasi-totalité des présentations. Cependant, l’IA n’est pas forcément utilisée là où on l’attendait le plus. Si les Large Language Models (LLM – ChatGPT) ont beaucoup fait parler durant les 18 derniers mois, les cas d’usage présentés relèvent plutôt de technologies d’IA plus “anciennes” (machine learning principalement). Peut-être que la prochaine IT-trans en 2026 présentera les 1er retours d’expérience avec des outils génératifs pour l’IV ou pour le service client ?
L’IA ne peut être mise en œuvre que sur la base de données de qualité. Ainsi de nombreuses présentations ont mis en valeur les données existantes et utiles, à l’interne ou à l’externe des entreprises, pour alimenter l’IA : Données de déplacements via les réseaux GSM, relevés de ponctualité, schéma de consommation électrique des appareils, données de composantes des véhicules, …
Dans les mises en application particulières, on retiendra notamment le monitoring basé sur l’IA des aiguillages ferroviaires aux Pays-Bas à des fins de maintenance préventive (voir encart), l’optimisation du cycle de vie des batteries des bus électriques (pour augmenter leur durée de vie) et l’expérimentation de nouvelles voies de bus sur la voirie grâce à des cônes (mesure de l’incidence sur la vitesse commerciale pour identifier les projets les plus pertinents).
I.A. et maintenance préventive de l’infrastructure
Afin de permettre au gestionnaire d’infrastructure ferroviaire hollandais d’anticiper les défaillances des aiguillages du réseau, l’organisation a utilisé un model basé sur le Machine Learning. Celui-ci permet de prévoir, sur la base de schémas de consommation d’énergie, une potentielle défaillance d’un aiguillage avant que celle-ci n’arrive. Grâce à cela, le gestionnaire d’infrastructure a pu économiser près de 3 millions d’Euros par année en réduisant les coûts de maintenance préventive ainsi que les pénalités.
Cybersécurité
Autre concept clé : la cybersécurité. Longtemps reléguée aux départements IT, elle suscite désormais un intérêt croissant qui se prolonge dans les processus de toute l’entreprise. La multiplication des applications et des données requiert ainsi une attention accrue pour protéger les infrastructures critiques des entreprises de transport public. Cette protection, préventive ou réactive, est bien entendu technique, mais également humaine:
- Protection technique : p.ex. mise en place de pare-feu, systèmes de détection d’intrusion, gestion des mots de passe, gestion des mises à jour régulières des systèmes, …
- Protection humaine : p.ex. formation continue des employés, sensibilisation aux bonnes pratiques de sécurité, gouvernance des données, développement d’une culture de vigilance face aux menaces numériques, …
In fine, il s’agit ainsi de considérer les processus dans leur globalité afin d’identifier un maximum de points de faiblesse sur la chaîne de valeur de l’entreprise et de minimiser l’exposition aux risques de l’organisation face au numérique.
Evolution des tendances
La digitalisation des transports publics montre une consolidation des tendances des dernières années. Les entreprises et les prestataires affichent désormais une maturité accrue, avec des cas d’usage plus spécifiques et des valeurs ajoutées plus palpables. Des sujets comme le Mobility as a Service (MaaS), la conduite autonome, et les services de transport à la demande ont ainsi franchi des étapes.
MaaS
Les projets de Mobility as a Service (MaaS) occupaient une place de choix dans les présentations à Karlsruhe ces 4 dernières années. Force est de constater que le sujet semble beaucoup moins porteur aujourd’hui et que certains projets qui se présentent comme des succès sont surtout très bien marketés (quelques centaines de téléchargements sur Android). Les principales difficultés semblent plus venir du domaine commercial que de celui de la technique: quel ratio de voyageur jongle réellement avec suffisamment de moyens de transport pour avoir besoin d’une solution intégrée ? le business de la mobilité a-t-il des marges suffisantes pour offrir des rabais groupés attrayants ? Ces réductions touchent elles de nouveaux voyageurs ou font elles du cannibalisme ?
Le Système Venda
Seul conférencier suisse, le Canton des Grisons représenté par Thierry Müller, a présenté sa nouvelle solution de paiement Venda. La solution est basée sur le SwissPass et des cartes VendaPrepaid, elles ont permis de mettre en place un système de ticket “cashless” adapté à la fois aux utilisateurs réguliers mais aussi aux visiteurs ponctuels de la région (p.ex. touriste). A noter la mise en place d’un écosystème complet avec la possibilité de payer certaines activités touristiques avec ce système.
Conduite autonome
Dans le domaine de la conduite autonome, il semblerait que nous avons aujourd’hui passé la phase de “ hype” et sommes entrés dans une tendance de consolidation. Les cas d’usage de la conduite autonome se précisent avec des périmètres d’application plus clairs et des retours sur investissement plus palpable (automatisation des déplacement dans les dépôts, bus de doublure autonome, bus autonome de 12m, etc.)
Il faut aussi dire que la législation a elle aussi permis des avancées dans ce domaine. Deux pays précurseurs – la France et l’Allemagne – ont adopté en 2021 des lois sur la conduite de véhicules autonomes, permettant une utilisation commerciale de la technologie.
Nouvelles perspectives sur les moyens de paiement
Le futur des titres de transport semble se dessiner clairement. Ainsi la vente de titres à bord est en voie de disparition, laissant place aux systèmes sans espèces pour optimiser les coûts et améliorer la vitesse commerciale. Cependant, l’intégration des systèmes de paiement « Open-Loop » (lier un titre de transport immatériel au moyen de paiement) reste un sujet ouvert, nécessitant encore des débats et des développements.
L’électrification des flottes
Bien que cruciale pour atteindre les objectifs climatiques des entreprises de transport, l’électrification des flottes n’a occupé qu’une petite partie des conférences. Le sujet semble complexe et impacte fortement l’écosystème informatique global des entreprises : planification devant tenir compte de la capacité des batteries (qui change en fonction de la météo), gestion des points de recharge, optimisation des coûts de l’énergie, …
De nombreux défis qui vont forcément mener à une accélération de la digitalisation des transports publics.
L’importance du facteur humain
De nombreux intervenants ont également souligné l’importance du facteur humain dans la transition vers la digitalisation des transports publics. La connaissance métier demeure un élément décisif pour l’identification et la mise en place de cas d’usage pertinents pour la Data et l’intelligence artificielle. C’est grâce à une étroite collaboration entre les équipes d’innovation et les équipes métier que peuvent émerger des applications concrètes et à forte valeur ajoutée.
La capacité de l’organisation à assurer le « upskilling » de l’ensemble de ses collaborateurs est tout aussi cruciale. Il s’agit d’un véritable investissement dans l’avenir de l’entreprise. Seules des mesures d’accompagnement ciblées, adaptées à la réalité de tous les collaborateurs, permettront d’atteindre une maturité digitale suffisante pour garantir une adoption appropriée des outils et processus issus de la digitalisation.
Enfin, la digitalisation des transports publics répond également à la pénurie de personnel dans certains domaines. Plusieurs entreprises ont partagé leurs difficultés de recrutement et les défis liés à la fidélisation de leurs collaborateurs, notamment les plus jeunes. Dans ce contexte, la gestion du changement revêt une importance particulière pour éviter de creuser un fossé au sein de l’entreprise.
En conclusion: une nouvelle accélération de la digitalisation
L’ensemble des présentations des entreprise de transport ont finalement fait état d’un même constat: Elles font face à une nouvelle vague toujours plus haute de digitalisation de leurs activités. Au menu: cybersécurité, intégration de flottes 100% électriques, maintenance préventive, système de paiement Cashless, connectivité (5g, VtoX), stockage et organisation des données (Big Data), intelligence artificielle, et bien d’autres encore.
Pour conclure, la digitalisation n’est plus uniquement du ressort des départements SI, mais une responsabilité partagée par l’ensemble de l’entreprise. Pour les entreprises, il est dorénavant essentiel de disposer d’une stratégie numérique bien ficelée, qui va soutenir la stratégie de l’entreprise et permettre de renforcer l’action de son département SI – au risque sinon de le voir rapidement dépassé.
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